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Eclaireuses Eclaireurs de France
Groupe Lapérouse de Boulogne-Billancourt

Les souvenirs du Panda

mercredi 12 novembre 2014

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Sébastien (Panda) a été louveteau, éclaireur,aîné puis responsable de 1984 à 1998, soit plus de 14 ans au sein du groupe. Il est, bien entendu, encore en relation avec le réseau des Anciens. Il nous livre son témoignage sur son passage au groupe.

Je suis rentré au groupe Lapérouse sur les conseils d’un ami. J’avais neuf ans. Mes parents voulaient m’inscrire dans un groupe scout mais ils ne savaient pas lequel. Il y avait un groupe EEDF proche de mon lieu d’habitation, dans le quinzième arrondissement, mais le groupe Lapérouse semblait offrir les plus grandes garanties de sérieux. Au printemps 1984, je me suis rendu avec ma mère dans le cabinet d’expert-comptable de Chevreau qui nous a reçus. Ils ont parlé entre adultes puis ont un peu parlé. Dans mes souvenirs, ça a duré une demi-heure. A la rentrée 1984, j’étais inscrit au groupe.

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Pierre Lévy (Chevreau) était le responsable et fondateur du groupe

Quand je me suis rendu au local pour la première fois, je n’avais pas d’uniforme. Je me suis approché d’une table ou on vendait les insignes. Une parente m’a accueillie avec un grand sourire, m’a souhaité la bienvenue au groupe. J’ai été surpris par cette marque d’importance à ma personne, moi petit nouveau. J’étais timide et j’étais impressionné par tout ce monde qui s’affairait dans cette grande salle. J’ai eu le sentiment de rentrer dans quelque chose d’important. Mais ça ne m’a pas trop plu, ça me paraissait trop ces gens qui se connaissaient, tout ce réseau de relation, toute cette histoire qui constituait le groupe Lapérouse. Je n’avais pas trop envie de m’intégrer à tout ça, je ne savais pas si j’allais rester. Je n’ai aucun souvenir de ma première sortie. Le rendez-vous vingt minutes avant le départ du train, les retrouvailles avec les potes, les parents qui parlent aux respons, ce qui allait devenir un rituel pour les quinze prochaines années, je l’ai vécu comme dans un rêve.

Au bout de trois sorties, on nous a remis notre foulard. J’étais dans la sizaine des gris, Anne-Laure était ma sizenière, je m’intégrais bien. A la fin de la sortie, on nous a demandé de rédiger un petit texte sur la signification de la remise du foulard que nous lirions en rassemblement. On le faisait par deux. J’étais avec une louvette dont je ne me souviens plus le nom et qui, je crois, n’est pas restée longtemps. J’aimais bien écrire et j’ai griffonné trois petites lignes sur un bout de papier. Elle l’a relu puis elle a voulu rajouter une phrase un peu plus humaine à ces quelques mots un peu froids : « Nous étions très contents. » Je n’étais pas d’accord, ça, me paraissait ridicule. Elle a insisté. Je lui ai répondu : « Bon, très bien, mais c’est toi qui le lis en rassemblement. »

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Le Camp de Coat Ermit (1985)

Mon premier camp était Coat Ermit, en Bretagne, à l’été 85. Je portais un sac de cuir avec des armatures en fer dont mes parents se servaient pour les vacances. L’année d’après, ils m’achèteraient un sac en textile plus moderne. Là-encore, je garde peu de souvenirs de cette première expérience de vie scout. La première semaine, j’ai écrit deux cartes postales à mes parents comme ils m’avaient demandé de le faire. Je ne l’ai plus jamais fait par la suite. On a fait un film sur les gaulois et les romains. J’étais gaulois. Dans une scène, nous buvons tous de la potion magique. Au moment de la boire, j’ai voulu faire comme dans les Asterix et j’ai bondi en l’air droit comme un i. J’étais surpris d’être le seul à le faire. Je garde un bon souvenir du week-end pédestre. On sortait du camp, on voyait de nouveaux paysages. Les respons nous avaient dit d’être économes sur l’eau. J’osais à peine toucher à ma gourde et je la buvais goulument le soir lorsqu’on arrivait au lieu de couchage. On discutait sans fin pour savoir combien de kilomètres on avait fait. Trois semaines sans mes parents, ça m’a paru long. Je comptais les jours même si je m’y plaisais bien. J’appréciais l’ambiance quotidienne, les parties de cartes sur les caillibotis, les parties de pichenette, les discussions le soir sur les lits de camp.

Cautines 2, ça reste un merveilleux souvenir. J’ai prononcé ma promesse louveteau, j’ai eu un nom de jungle, je suis devenu sizenier en remplacement de François qui n’avait pas pu se rendre au camp pour raison médicale. On a fini troisièmes au challenge. J’étais content de ce résultat, car cette compétition ne m’intéressait pas trop. Le soir, dans la rouchie, on avait de grandes discussions sur les super-héros. Je ne prenais pas trop la parole car j’étais plutôt inculte sur ce thème mais ça me faisait rêver. Le lieu de camp était super. On passait dix fois par jours sur un pont qui enjambait une rivière. D’un côté, se trouvaient les rouchies, de l’autre une grande prairie. Je me souviens d’une grande discussion avec Francesco sur cette vaste étendue herbeuse. La journée commune m’a emballé. Les coins de pat des éclés étaient séparés entre eux par de petites rivières, Bruno s’amusait à les franchir d’un bond. J’étais impressionné par la cuisine que nous a servie la patrouille qui a accueilli ma sizaine. Ce jour-là, j’ai su que j’irai aux éclés.

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Sébastien (le louveteau le plus à gauche) au camp du Plouay (1987)

Ça s’est fait un peu plus d’un an plus tard. C’était la première sortie de l’année. On a fait un rassemblement puis Fennec nous a emmenés vers le lieu éclé. Il nous a fait nous assoir dans la forêt puis nous a demandé quel était notre meilleur souvenir des louveteaux. J’ai cité le camp de Cautines. Ensuite, on nous a intégré dans les patrouilles. J’étais chez les Ours avec François. J’ai été bien accueilli mais j’ai tout de suite fait la différence. J’étais trop naïf, il fallait que je grandisse. A la fin de la sortie, j’ai demandé à Michel s’il pouvait me relayer pour porter le sac poubelle et il m’a appris une expression : « Je ne suis pas né de la dernière pluie. » L’année s’est bien passée. Au camp, à Carpentras, j’étais impressionné par Manu et Anthony qui portaient les perches pour les constructions. Le temps était superbe, la ville de Carpentras très jolie. Les Ours ont été deuxièmes aux constructions mais premiers au challenge. L’explo, on l’a passé dans une piscine. J’ai attrapé d’énormes coups de soleil, et il a fallu les soigner une fois revenu au camp. J’ai adoré la grande av, le paysage était sec et superbe. J’ai mangé comme quatre à la pause déjeuné après la montée de la matinée.

Mon meilleur souvenir des éclés, ça reste Briançon 1. Le lieu de camp était génial, une petite prairie encadrée par des montagnes. Les ours ont construit une table ronde. Pour manger, c’était super convivial. J’ai souffert durant la grande av, une bonne marche en montagne. Des guides québécoises qui visitaient la France ont passé une partie du camp avec nous. Durant la marche, elles n’ont pas supporté la première grande montée. Elles ont toutes arrêtées les unes après les autres. Une seule a continué. J’ai prononcé ma promesse à ce camp. Quelques jours avant la cérémonie, Chevreau est venu me voir pour en discuter. Une chose me gênait dans le texte : « Servir son pays ». J’étais plus d’accord avec la fin de la phrase : « et l’amitié entre les hommes ». A l’école, on apprenait que le futur c’était l’Europe. J’aimais bien dans les interviews à la télé ou à la radio les artistes qui se disaient citoyens du monde. Chevreau m’a demandé si mon pays signifiait quelque chose pour moi, je n’ai pas su quoi lui répondre. J’y ai réfléchi les jours suivants et je me suis dit que le pays, ça n’était pas seulement la nation, ça pouvait être aussi son entourage, sa ville, un continent, le monde, c’était à chacun de lui donner sa propre définition.
A proximité du lieu de camp, se trouvait Briançon et sa vieille ville tout en pente. On s’y est rendu à pied. Je crois qu’une éclaireuse a trouvé un artisan qui lui a vendu une bague de foulard avec son nom dessus et la moitié du groupe lui en a acheté.

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Sébastien en Côte d’Ivoire

Pour mon premier camp de clan, j’ai eu la chance de participer au troisième camp-chantier en Côte d’Ivoire organisé par Zéphyr et Orcel. On a débarqué à l’aéroport d’Abidjan en fin d’après-midi. On m’avait prévenu que le premier contact avec le climat équatorial constituait un choc. Quand je descends de l’avion, je sens un puissant courant d’air chaud. Je me dis « C’est pas possible, ça va pas être ça durant un mois. En fait, c’était la soufflerie de l’avion qui évacuait l’air chaud. Une fois sur le tarmac, j’ai compris ce dont on m’avait parlé, cette sensation d’un air pesant, humide. Mais une fois le choc passé, on oublie totalement. Une vingtaine d’ivoiriens étaient venus nous accueillir. Après les salutations, on se répartit dans les automobiles qui nous doivent nous amener à Agboville. Ce que je remarque en premier, c’est que tous les taxis sont de marque japonaise et qu’ils portent sur leur pare-brise arrière des inscriptions telles que « Jesus protège mon commerce ». Entre l’aéroport et Abidjan, il y a un autoroute. J’avais seize ans, c’était mon premier voyage dans un pays du tiers-monde et le dépaysement était total. Des vaches broutaient sur la pelouse au milieu des deux voies, les abords de la route étaient couverts de détritus. J’étais collé à la fenêtre, fasciné par ce spectacle. On dépassa Abidjan et on s’engagea dans la campagne. Nos deux conducteurs s’arrêtèrent au bord de la route dans un village pour nous faire boire du bangui, le vin de palme, la boisson locale. On nous le servit dans des verres en plastique qu’une femme nettoyait devant nous. Je devais oublier une bonne partie des consignes que j’avais lu avant le départ sur les précautions à prendre avec l’eau. Le verre m’était offert et je ne pouvais pas le refuser même si je ne savais pas d’où provenait l’eau qui avait servi à le nettoyer. De toute façon, l’alcool avait dû nettoyer tout ça. Pour le premier repas, on est reçu dans la maison de quelqu’un. Il fait nuit tôt, je sors quelques minutes dans la rue. Ensuite, on transporte des matelas jusqu’à notre lieu de couchage.
Le camp chantier a duré trois semaines. On travaillait le matin. On fabriquait les briques que les maçons utilisaient ensuite. Le chef des maçons, c’était Simon, un burkinabé qui avait des traces rituelles sur le visage. Le chantier avançait vite. On a construit une école de couture pour jeunes filles. Au début, je m’occupais du ravitaillement en eau puis j’ai attrapé une pelle et je me suis mis aux briques et au ciment. Il fallait fréquemment déplacer les briques. L’après-midi, on visitait Agboville, son grand marché, sa mosquée. Je discutais beaucoup avec les jeunes qui venaient nous voir. Je lisais aussi, un livre de science-fiction que j’avais amené. La dernière semaine, on a fait du tourisme. On a été à San Pedro, un port secondaire par rapport à Abidjan. Les plages étaient belles, la mer forte. J’étais fasciné par les vieux raffiots qui venaient déposer leur marchandise. C’est peut-être de là que m’est venue mon envie de faire des études de transport international.

Sébastien en Grece
Sébastien en Grèce

Je suis devenu responsable louveteau à dix-sept ans. Je gardais un bon souvenir de mes années de louveteau et j’aimais bien les enfants de cette tranche d’âge. L’animation ne m’a pas paru quelque chose de trop compliquée. La première fois que j’ai encadré un jeu, ça a été plutôt bordélique mais je crois que c’est parce que j’étais trop présent, je voulais tout contrôler. Les jeux suivants, je me suis laissé aller et tout s’est bien passé. Ce que je préférais, c’est préparer les grands jeux, inventer des histoires qui amuseraient les louveteaux. A mon troisième camp, nous avons mélangé le week-end pédestre avec un grand jeu. Le thème du camp était le moyen âge et je m’étais inspiré d’une chronique que j’avais trouvée dans le Lagarde et Michard sur la prise de Constantinople par les croisés. Je me suis bien amusé en tenant mon discours, j’étais déguisé en doge de Venise, j’émaillais mes phrases de mots du moyen âge que les louveteaux ne comprenaient sans doute pas mais qui les faisaient rire. J’ai aussi bien aimé préparer de petits sketchs avec un groupe de louveteaux pour les veillées lors du camp.
Ensuite, je suis devenu responsable clan. Bien sûr, c’était très différent. On a fait un camp en Grèce puis de nouveau une Côte d’Ivoire. Après cela, j’ai essayé de trouver ma place dans l’équipe de groupe, mais ça ne m’a pas convenu. Comme je ne me voyais pas reprendre une activité de responsable, j’ai quitté le groupe… pour vivre d’autres aventures avec mes copains éclés devenus anciens !
Sébastien Crispeels (Panda)

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Sébastien au Pérou (2008)
seb ghana
Sébastien au Ghana (2009)
seb Inde
Sébastien en Inde (2010)
seb grenouille
Sébastien en Homme-Grenouille (2008)

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